Conakry – Accusés d’avoir escroqué plus de 416 candidats au pèlerinage, Hadja Domani Konaté, connue sous le sobriquet « Nani », et ses complices ont été libérés dans des circonstances pour le moins troublantes.
Selon des informations concordantes, ce présumé auteur d’une vaste arnaque des pèlerins n’a jamais été réellement incarcéré, malgré les annonces officielles.
Arrêtée le mercredi 28 mai 2025 par la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), Hadja Domani a officiellement été placée sous mandat de dépôt le 2 juin 2025, à la maison centrale de Conakry, où étaient déjà détenus trois de ses complices.
Son arrestation avait été largement médiatisée, notamment à travers sa prestation à la télévision nationale. Mais selon nos enquêtes, cette détention ne serait qu’une mise en scène. En réalité, elle serait rentrée chez elle juste après son passage médiatique.
Les révélations sont explosives. Hadja Domani aurait usurpé une fausse proximité avec la mère du président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, pour gagner la confiance des victimes.
Mais derrière ce rideau, les véritables instigateurs se cacheraient plus haut.
Le mercredi 4 juin 2025, vers 16 heures, les co-accusés de Hadja Domani ont été discrètement libérés à la maison centrale, 7 jours après leurs incarcération .
D’après des sources pénitentiaires, cette libération serait le fruit d’une intervention directe de Aïcha Doumbouya, sœur du président de la transition et considérée comme le cerveau du réseau .
Un garde pénitentiaire affirme :
« En vérité, Hadja Domani n’a jamais mis les pieds à la maison centrale. Quant à ses complices, ils étaient déjà là depuis quelques jours. Le jour de leur supposé placement, la sœur du président a personnellement appelé le régisseur, Moriba, pour faire installer des climatiseurs dans leur cellule. Ce qui a été fait immédiatement. Ces personnes étaient traitées comme des VIP. Aucun cadenas sur leur cellule, fermeture libre, appels réguliers avec la sœur du président sur haut-parleur, sous nos yeux. »
Le même agent ajoute :
« Alors que les cellules ferment normalement à 17h, eux restaient dehors jusqu’à 22h. C’était à eux de décider quand fermer ou ouvrir leur cellule. »
Toujours selon nos sources, c’est cette même Aïcha Doumbouya qui avait facilité l’évacuation de Mandian Sidibé en janvier 2025 , également accusé dans une autre affaire de détournement de plusieurs milliards dans laquelle son nom apparaît, deux semaines seulement après son placement sous mandat de dépôt , sous prétexte d’une évacuation médicale. En vérité , il dormirait chez lui et ne se rendrait à l’hôpital que dans la journée.
Le procureur Magass et le juge d’instruction Ali Badara Komah, en poste au tribunal de première instance de Kaloum, auraient été « intimés » par la sœur du président de procéder à la libération immédiate des présumés accusés d’arnaques et d’escroquerie en bande organisée .S’opposer à elle, c’est aussi risquer de perdre son poste
Pourtant le 2 juin, face à la colère grandissante des victimes , le porte-parole de la présidence, le général Amara Camara, a pris la parole pour calmer les esprits, promettant deux choses :
Démantèlement du réseau : « Nous mettrons tout en œuvre pour identifier tous les responsables et faire en sorte que justice soit rendue. »
Hajj gratuit en 2026 pour les victimes : « Des dispositions seront prises pour leur inscription gratuite au prochain pèlerinage. Une commission de recensement sera mise en place par le CNRD. »
Mais pour de nombreux observateurs, ces promesses sonnent creux face à une justice à géométrie variable. Pendant que des voleurs de téléphone écopent de 10 ans de prison, d’autres, accusés d’avoir ruiné des centaines de familles, échappent à toute poursuite grâce à leurs connexions au sommet de l’État.
Affaire à suivre
Nous y reviendrons
Abdoul Latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant